66 Généralités (s)

Jeff Beck et Johnny Depp s'associent sur 18, leur premier album en commun. Sur ce disque, le premier enregistrement studio de Jeff Beck depuis six ans, les artistes se livrent à des performances inattendues sur onze reprises et deux originaux qui touchent à tout, du celtique à la Motown en passant par John Lennon, les Beach Boys et le Velvet Underground. Le résultat est un tour de montagnes russes à travers différents genres qui procure des frissons tout au long de l'album.

L'univers hypnotique de Ghost Woman est l'oeuvre du mélodiste compulsif Evan John Uschenko, en dépit des aléas propres à la vie trépidante d'un artiste en tournée : sauvetage et remplacement d'instruments après un incendie, van cambriolé et de nombreux déménagements. A l'école de l'authenticité qu'Uschenko semble partager avec ses pairs révoltés du nouveau rock psyche Kurt Vile ou The Black Angels, Ghost Woman s'inspire largement de groupes comme Jefferson Airplane, The Byrds et The Firesign Theatre. On ne sera donc pas surpris que le groove parfois krautrock de l'album soit souvent contrebalancé par l'exploration des chagrins d'amour et des faux espoirs.

L'autrice-compositrice-interprète et violoniste, fondatrice du groupe The Highwomen, présente Take it like a man. Amanda a collaboré et tourné avec John Prine, Justin Townes Earl et est membre à part entière de Jason Isbell & The 400 Units (lauréat d'un Grammy Award).

Près d'un an et demi après la sortie de son album My Echo, la chanteuse native de Portland présente Found Light via le label Bella Union. Bien qu'il s'agisse techniquement de son 12e album studio, il ressemble aussi à bien des égards à son tout premier : Found Light est son premier disque coproduit aux côtés de Shahzad Ismaily et permet à Veirs d'embrasser une souveraineté et une indépendance artistique qu'elle n'avait jamais connue auparavant. C'est un album 14 titres mêlant lyrisme brut et honnête à une indie rock addictive. C'est une sorte de témoignage d'indépendance, de la création de nouvelles possibilités pour soi-même, même après une grande perte. Found Light est un rappel que nous sommes toujours capables de quelque chose de plus dans la vie.

Au bout de 15 ans d'existence, c'en est finit des années Versatile pour Zombie Zombie. Désormais bien calé au sein du catalogue Born Bad sur lequel il a là aussi totalement sa place, le trio ne se repose pas sur ses lauriers et continue de prendre des risques. Désormais, ça chante en latin histoire de rester mystérieux, et ça s'amuse plus que jamais côté arrangements. Ça s'amuse même tout court, pourrait-on dire. Nusquam et Unique, premier extrait dévoilé et en écoute ci-dessous, pousse même les bpm pour sonner la réunification espérée des musiciens avec leur public.

Voici le premier album chez NoMadMusic de la pianiste Célia Oneto Bensaid, étoile montante de la jeune génération. Ce programme met en regard les cinq Métamorphoses de Philip Glass avec les cinq Miroirs de Ravel. Number 1, écrit en hommage à Jackson Pollock par Camille Pépin, complète ce disque, en forme de clin d'oeil à Glass et aux minimalistes américains, grande source d'inspiration de la jeune compositrice. Un album qui flirte avec les frontières d'une transe hypnotique et nous emmène loin au pays des songes.

Alexis Kossenko et Vassilis Varvaresos plongent dans l'atmosphère fantastique de l'Europe du Nord où réalité et imaginaire se confondent. Contes et légendes peuplent l'imaginaire des compositeurs et nimbent leurs oeuvres de mystère. La figure d'Ondine, créature des eaux ayant inspiré Carl Reinecke, est le point de départ d'un programme singulier, peuplé de créatures troublantes et fascinantes. Sur un magnifique instrumentarium d'époque, Alexis Kossenko et Vassilis Varvaresos parviennent à esquisser une remarquable fresque sonore de ce romantisme nord-européen tardif, à l'imaginaire nourri par le folklore. Les couleurs si particulières qui en émergent confèrent une incroyable vivacité à ces tableaux et à leur galerie de personnages oniriques.

Formant depuis plusieurs année un duo percutant sur scène, Marie-Laure Garnier et Célia Oneto Bensaid enregistrent un premier album pour NoMadMusic. Mélange ingénieux entre les oeuvres d'Olivier Messiaen, Francis Poulenc et des Negro-spirituals, ce disque chante le sacré et l'espoir pour célébrer une société métissée, riche de sa culture multiple.

Corruption ? Trahison ? Persécution ? Tyrannie ? Ces sujets résonnent avec l'actualité des XXe et XXIe siècles. Ils font aussi référence aux thèmes de nombre d'oeuvres musicales du XVIIe siècle. Kate Lindsey a choisi de consacrer ce second récital baroque avec l'ensemble anglais Arcangelo, dirigé par Jonathan Cohen (après Arianna en 2020) à la figure de Néron. Scarlatti, Händel et Monteverdi ont écrit des ouvrages autour de ce protagoniste tragique et son entourage : sa mère Agrippina, ses femmes (Poppea et Ottavia). Incarné avec une incroyable intensité par la mezzo-soprano américaine, ce programme comporte un enregistrement inédit de la cantate La morte di Nerone (vers 1690) d'Alessandro Scarlatti et une autre première mondiale, la cantate La Poppea (1685) de Bartolomeo Monari. Le ténor Andrew Staples et la soprano Nardus Williams rejoignent Kate Lindsey pour des duos extraits du Couronnement de Poppée dont le poignant "Pur ti miro" !

Chaque année, le Concours d'Orléans consacre un ou une jeune pianiste et, à travers eux, le meilleur de la création. Mikhaïl Bouzine est de ceux qui pensent avec passion et une rare acuité politique le répertoire contemporain. Il livre là avec la complicité de B Records un programme détonnant et singulier.

Fidèle à sa volonté d'être différent à chaque fois, après un album piano-voix, puis une ouverture vers une formule plus pop, il a privilégié une approche intimiste sous forme d'un trio : Marc Haussmann, un pianiste rencontré à Berlin qui l'accompagne désormais en tournée, Alice Animal, qu'il a découverte en la voyant chanter sur scène avec sa guitare électrique, et lui-même à la guitare sèche. La production a été confiée, comme pour le précédent album, à David Sztanke, qui fut le fondateur du groupe Tahiti Boy & The Palmtree Family et qui est parvenu à restituer la volonté initiale de simplicité tout en la parant de charmes pop. L'impression d'authenticité qui se dégage des onze chansons n'est pas due au hasard : elle est liée à ces choix d'enregistrement qui, en harmonie avec les conditions de conception, permettent d'apprécier à sa juste valeur cette voix chaude et chaleureuse, ces mélodies qui trottent dans la tête au fil des ballades et ces textes dont l'impact poétique se conjugue sur différents modes.

Une puissance primale et viscérale à la rage contestataire habite celle qui poursuit sa route en dehors des lignes droites. La voix de Melissmell, c'est la voix d'une artiste en survie, qui a connu la rue et l'identité du sans abri. Il vient de là ce cri à la fois puissant et vulnérable qui fait d'elle une artiste totalement à part sur la scène française. Accompagnée de Christian Olivier (Têtes Raides), Denis Barthe (Noir Désir) ou encore Matu (Indochine, Mano Solo), elle revient avec un album en forme de brûlot.

Fascinée depuis toujours par l'agent 007, elle a regardé ces films et a écouté les bandes originales des dizaines de fois. Tout un univers chatoyant de voyage, d'exotisme, d'érotisme, de luxe et de danger. C'est avec mélancolie qu'elle s'est remémorée tout cela en pleine pandémie mondiale. C'est alors que sont nées ces reprises de génériques, versions désossées, squelettiques, tel des souvenirs lointains et d'une époque faste et disparue que se remémorerait une chanteuse dans un bar de bluesman post-apocalyptique. Elle y joue du piano qui est la base de l'album. Ses complices Yan Péchin (guitare), Frederic Gastard (Sax) et Arnaud Dieterlen (Batterie) l'accompagnent dans cette rêverie-hommage à la fois douce et écorchée.

Et si nous rendions hommage à la carrière et l'oeuvre de Jean-Louis Murat ? Si cet hommage prenait une forme originale, enracinée, proche des territoires familiers de l'artiste? De l'Auvergne au Rhône, en passant par la Loire ou bien-sûr la Haute-Savoie, entre autres, c'est un panorama significatif que nous mettons en exergue dans l'élaboration de ce beau projet. Un album de reprises, plurielles, piochées dans le répertoire tentaculaire du bonhomme. Un concert pour célébrer cela, envisagé comme un rendez-vous fédérateur entre fans, artistes, suiveurs et accompagnateurs de cette carrière au long cours. Des interprètes issus de la région Auvergne-Rhône-Alpes, croisant le fer de leur identité avec des chansons évidentes et puissantes.

Soudain, un album incontournable, vrai et sincère dans le paysage de la nouvelle scène française. Soudain les oiseaux, cinquième album de Vanessa Philippe, est un hommage à sa grande soeur disparue en août 2019. Auteure, compositrice et interprète, Vanessa écrit et compose pour la première fois la totalité des chansons. En contraste avec le sentiment de deuil, elle imagine des arrangements très pop, à tendance électro avec des instruments virtuels. Elle confie alors la réalisation à Pascal Parisot, en continuité avec l'album précédent, et le mixage à Angy Laperdrix (Mocke, Barbara Carlotti...).

Sugar & Tiger. Référence aux surnoms que les serveuses des diners américains utilisent pour s'adresser aux clients et à la tendance bondissante de Didier (Wampas) ? Ou simplement une façon de traduire au mieux la fusion élégante entre pop et punk dont résulte l'alchimie entre Florence et Didier ? Quoi qu'il en soit, 2022 est résolument pop, résolument punk, résolument musical, et définitivement Sugar & Tiger.

Si les masques africains sont bien connus, leurs voix - pourtant essentielles - le sont beaucoup moins : ils parlent et chantent. À travers la musique s'expriment les masques les plus modestes, destinés au divertissement, comme les plus puissants au fort pouvoir surnaturel. Les masques étant considérés chez les Dan comme des êtres surnaturels, ils ne parlent ni ne chantent avec une voix humaine. Mais, comme ils sont incarnés par des hommes, il faut bien que ceux-ci changent leur voix en celle d'un être surnaturel. Les Dan connaissent trois techniques leur permettant d'arriver à cette fin : ou bien ils déforment leur propre voix, ou bien ils parlent dans un instrument qui modifie le timbre de leur voix, ou bien ils substituent à la voix humaine des instruments sonores cachés aux non-initiés. Le masque est, techniquement parlant, un déguisement de l'homme qui assume ainsi une personnalité autre. Selon les conceptions religieuses en Afrique noire, l'homme masqué a abandonné sa personnalité humaine et incarne un être surnaturel, le plus souvent un esprit d'ancêtre, un être mythique ou un génie de la brousse.

Entre Shadi, soliste du setâr formée à Téhéran par le grand maître de la musique classique persane Dariush Talaï, et Bijan, virtuose du zarb, du daf et autres percussions, s'est imposée l'idée d'allier les instruments à cordes frottées et à cordes pincées, ainsi que les percussions et les instruments à vent, en s'entourant d'invités. Au fil des titres surgissent ainsi habilement les notes de Redi Hasa au violoncelle, de Shervin Mohajer au kamantcheh iranien (instrument à cordes frottées de la famille de la vielle) et de Sylvain Barou aux flûtes (doudouk, bansurî, etc.). Comme une ponctuation onirique et irradiante, cinq morceaux donnent aussi à entendre des poésies de Khayyâm, Mowlana Rûmi et d'auteurs persans contemporains, portées par la voix de Shadi. Dans une actualité dramatique, après deux années durant lesquelles la culture s'est tue, Âwât résonne comme une renaissance foisonnante où s'entremêlent la douceur des mélodies et la puissance de l'interprétation.